Vous trouverez ci-dessous le dernier exemplaire d’AFVS Info, dont voici l’éditorial.
L’Agence régionale de santé Ile-de-France vient de renforcer son dispositif sanitaire sur les anciennes plaines d’épandage de Pierrelaye-Bessancourt, qui s’étend sur onze communes dans le Val-d’Oise, ainsi que d’Achères et de Carrières-sous-Poissy, Triel-sur-Seine dans les Yvelines (1). En cause, les possibles conséquences sur la santé liées à la contamination des sols par le plomb, surtout dans les jardins privés, une contamination qui peut donner lieu à un risque de saturnisme notamment chez les enfants.
Le dispositif d’incitation au dépistage de la population, pris en charge à 100% par l’assurance maladie pour les femmes enceintes et les enfants, est ainsi renforcé, et les professionnels de santé recevront un nouveau courrier de l’ARS. En effet, en octobre 2018, l’agence en avait adressé un à plus de 500 professionnels de santé de la zone concernée : médecins généralistes, pédiatres, gynécologues, sages- femmes, centres de PMI, établissements de santé, centres de santé. C’est ainsi qu’elle a pu détecter un cas de saturnisme infantile et une femme enceinte dont le taux de plomb dans le sang était supérieur à 50 μg/litre, seuil sanitaire à partir duquel le saturnisme doit être déclaré, les deux cas à Carrières-sous- Poissy, dans les Yvelines, sans qu’un lien direct puisse être formellement établi entre ces intoxications et la pollution des sols.
Bien que parmi les habitants de Pierrelaye la vague d’inquiétude soit passée depuis les premières recommandations de l’ARS, certains parents restent moins rassurés, alors que les élus minimisent l’affaire et assurent que s’il faut rester vigilants, il n’y a aucune remontée d’incidents liés à la présence de plomb dans le sol. L’AFVS a d’emblée contacté les maires des zones concernées. Un seul d’entre eux a répondu à notre courrier.
Pour sa part, l’association Val-d’Oise Environnement a réagi aux conclusions de l’étude sanitaire menée par l’ARS : 20 ans après la première alerte donnée sur la pollution, ses militants continuent de surveiller la plaine de Pierrelaye-Bessancourt. Effectivement, à la fin des années 1990, l’association donne l’alerte, se bat contre son urbanisation et dépose plainte contre X pour lutter contre la pollution des sols. C’est ainsi que, dès juin 1999, les légumes et aromatiques qui y sont produits ont été interdits à la vente.
Si la première étude concluait à l’absence de risque sanitaire au plomb, Val-d’Oise Environnement estime que cette nouvelle étude doit être prise en considération, les espaces urbanisés surveillés, même si, potentiellement, le risque est dit « acceptable » en interdisant certaines activités ou la présence des enfants. Les deux cas de saturnisme relevés parmi les habitants de Carrières-sous-Poissy ont été à l’origine de la démarche d’un élu écologiste au conseil régional qui a déposé plainte contre X pour mise en danger de la vie d’autrui, après des expositions anormales au plomb relevées dans les plaines d’Achères, Carrières- sous-Poissy et Triel-sur-Seine. Et l’élu de préciser que la situation est préoccupante et les risques élevés pour la population, car certains terrains présentent des taux cinq fois supérieurs au seuil d’alerte réglementaire.
Il est à noter que si la plainte est dirigée contre X, elle vise indirectement le syndicat interdépartemental pour l’assainissement de l’agglomération parisienne (SIAAP). Au-delà du risque environnemental, l’enjeu de cette procédure est d’établir des responsabilités afin d’aboutir à des contraintes financières et faire payer les responsables de la pollution au plomb de la plaine, avec, en ligne de mire, l’assainissement de cette plaine également polluée par des dépôts sauvages et des hydrocarbures polycycliques cancérigènes. Une première qui pourrait remettre en question des décennies de traitement des eaux usées en région parisienne.
Il semble qu’un secteur pilote soit envisagé pour mener des actions, ce qui serait une première étape pour évaluer l’impact de ces pollutions sur la santé des populations. L’AFVS reste vigilante sur l’évolution de ce dossier. Constatant le manque d’information des populations, nous avons adressé un courrier aux directeurs des Caisses primaires d’assurance maladie leur demandant d’alerter les assurés sociaux de ces zones, mais nous n’avons eu aucun retour.
Suivant les recommandations de l’ARS, l’AFVS souhaite que les médecins proposent un dépistage ciblant en priorité la population confrontée à un ou plusieurs risques de saturnisme.
(1) Voir notre éditorial « Risque de saturnisme infantile dans cinq plaines d’Ile-de-France », AFVS-Info, n° 18, novembre-décembre 2018.